Nickel calédonien : une industrie stratégique mais menacée

Depuis la découverte des premiers gisements à la fin du XIXe siècle, le destin de la Nouvelle-Calédonie est intimement lié à l'exploitation du nickel, une ressource devenue importante pour la transition écologique.

Mais à un contexte de marché mondial dégradé s'ajoutent des difficultés structurelles, qui menacent la première activité économique du "Caillou". Vendredi, l'usine KNS, dans le nord de l'île, a fermé ses portes après 11 années d'existence, laissant 1.200 salariés au chômage. Première source de richesse de la Nouvelle-Calédonie et objet de vives tensions sociales depuis des décennies, "or vert" et "métal du diable", le nickel représente directement ou indirectement 20 à 25% des emplois privés du territoire, au rythme des aléas d'un marché d'une grande volatilité. Car en matière de nickel, il existe une distinction cruciale : celui issu des amas sulfurés est stratégique, car le sulfate de nickel entre dans la composition des cathodes de batteries lithium-ion des véhicules électriques, pour lesquelles la demande devrait fortement augmenter dans les prochaines décennies.

Et il y a le nickel de latérite, issu de roches rouges essentiellement présentes dans les milieux tropicaux, utilisées en métallurgie pour la création d'alliages et d'acier inoxydable.
Or, si l'archipel possède environ 5% des ressources mondiales du métal, selon l'United States Geolocigal Survey (USGS), seule l'usine Prony du sud de la Grande-Terre produit le précieux sulfate. Les deux autres usines de l'archipel, SLN à Nouméa et KNS au nord, sont dédiées à la production de ferronickel, plus énergivore. Mais la volatilité des cours est problématique: d'environ 30.000 dollars en janvier 2023 au London Metal Exchange (LME), une des principales bourses mondiales pour le nickel, la tonne de nickel n'en valait plus que 16.500 dollars en décembre de la même année, un recul de 47% de sa valeur. Et l'industrie calédonienne est désormais fortement concurrencée par l'essor de l'industrie minière en Indonésie, dopée aux capitaux chinois et dont l'énergie est subventionnée. Avec la découverte graduelle dans la dernière décennie des plus importantes réserves de nickel au monde (42%, selon l'USGS), l'Indonésie est en mesure d'inonder le marché de ferronickel de moindre qualité, mais dont les volumes compensent la faible rentabilité. Confronté à cette concurrence, à la hausse des prix de l'énergie et à l'épuisement des gisements les plus riches, le nickel calédonien rencontre d'importants problèmes de rentabilité, et l'Etat a dû intervenir massivement pour soutenir le secteur dans les dernières années.

- Matière première "essentielle" -

Les trois mines et usines métallurgiques ont déjà reçu "plus de 700 millions d'euros d'aide" d'argent public depuis 2016, rappelait ainsi le ministre démissionnaire de l'Economie Bruno Le Maire en mars dernier, incitant collectivités calédoniennes, Etat et industriels de la mine et de la métallurgie à signer un "pacte nickel". L'Etat s'engagerait ainsi à investir dans le secteur afin de permettre sa modernisation et la rationalisation des coûts en énergie, l'une des principales charges de l'industrie du nickel ; mais la contribution attendue des collectivités calédoniennes était jugée trop importante par le Congrès de la Nouvelle-Calédonie. Le territoire est en effet déjà lourdement endetté, notamment par les prêts d'urgence contractés durant la pandémie de Covid-19. Source d'espoir pour l'industrie calédonienne, la filière des batteries électriques pour voitures se structure progressivement en Europe. En 2023, l'UE a ajouté le nickel à sa liste de matières premières "essentielles" pour "les ambitions écologiques et numériques de l'Europe" ; et quatre projets de "gigafactories" de batteries en France pourraient alimenter la demande en nickel, selon le rapport "Avenir de la filière du nickel en Nouvelle-Calédonie" 2023 du Conseil général de l'économie (CGE) et de l'Inspection générale des finances (IGF).

Or, la quantité limitée d'amas sulfurés disponibles, matériaux de choix pour la conception des batteries, est insuffisante pour couvrir la demande. Le traitement des latérites sulfurées, dont la Nouvelle-Calédonie possède d'importantes ressources, pourrait ainsi constituer un nouveau débouché et redonner du souffle à son industrie.
Mener cette transformation exigerait toutefois d'importants investissements dans les infrastructures, alors que les usines de la Grande-Terre connaissent des difficultés existentielles. Pour répondre aux besoins de l'UE en nickel de batterie, la Nouvelle-Calédonie devrait ainsi "résorber un déficit de compétitivité considérable", prévenait le rapport "Avenir de la filière du nickel" en août 2023.


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