Hier soir, à l’auditorium du Crédit Agricole de La Réunion, l’expédition Plastic Odyssey a jeté l’ancre dans le cœur des consciences. Accueillie dans le cadre d’un partenariat avec le programme EXPLOI (Expédition pour la lutte contre les pollutions plastiques dans l’océan Indien), porté par la Commission de l’océan Indien (COI) et soutenu par l’Agence française de développement (AFD) et le Fonds français pour l’environnement mondial (FFEM), cette rencontre fut l’occasion de découvrir le navire-laboratoire, ses technologies de recyclage embarquées et les ambitions de toute une région pour endiguer la pollution plastique.
Devant un public réuni au siège du Crédit Agricole Réunion Mayotte, le ton a été donné d’entrée par Didier Estèbe, représentant de la banque et hôte de la soirée : « On a vu depuis le début de la semaine beaucoup, beaucoup de jeunes qui sont passés avec des yeux énormes pour découvrir à la fois les actions qui sont faites par Plastic Odyssey, mais aussi découvrir le bateau. »
Anfani Msoili, représentant la COI, a ensuite présenté le programme EXPLOI avec passion, malgré une intervention riche et dense : « Ce projet, il a sa particularité surtout d’avoir ce volet scientifique très ancré. […] Le projet EXPLOI […] vise plus de 200 écoles […] et plus d’une vingtaine de doctorants seront associés au niveau de chaque pays. » Financé à hauteur de 6,7 millions d’euros, le programme entend combiner recherche scientifique, mobilisation citoyenne et solutions économiques concrètes pour faire de l’océan Indien « un océan sans plastique ».
L’intervention la plus attendue fut sans doute celle de Simon Bernard, président et cofondateur de Plastic Odyssey. En retraçant le parcours du navire depuis Marseille en 2022 jusqu’à l’océan Indien, il a livré un récit d’engagement : « Nous avons quitté le port de Marseille avec 15 membres d’équipage à bord d’un navire pas comme les autres. […] Un véritable laboratoire flottant équipé d’un atelier de recyclage rempli de machines low tech. »
Face à la pollution invisible, Simon Bernard souligne que « la grande majorité de cette pollution, en réalité, on peut la traiter ici. » La mission s’organise autour de trois axes : réduction, recyclage, et restauration des écosystèmes. À chaque escale, l’équipe collabore avec des entrepreneurs locaux pour déployer des micro-usines dans des containers, capables de recycler jusqu’à 700 tonnes de plastique par an.
Interrogé sur l’efficacité de ces démarches dans les territoires insulaires, il précise : « Ce plastique, on ne le revend pas en tant que matière, mais en tant que produit fini – comme des palettes, du mobilier urbain ou des tuiles – pour donner une valeur à ce qui n’en avait plus. »
Muryel Blanc, dirigeante de Bourbon Packaging, a souligné l’importance d’un dialogue avec la filière plasturgie : « Nous avons des combats communs […] et je pense que c’est tous ensemble que nous pourrons développer la pédagogie, la réduction et le recyclage. »
En réponse, Simon Bernard a rappelé que « souvent, ce n’est pas une question de matériaux alternatifs, mais d’usages alternatifs », citant l’exemple de la bouteille d’eau, qu’il préfère voir remplacée par de l’eau en vrac distribuée en fontaine.
Didier Estèbe a conclu en saluant les initiatives locales : « On a des entreprises qui transforment les pneus, d’autres qui reviennent au principe de la consigne. […] C’est la mise en mouvement collective qui est importante. »
Et ce mouvement continue : après La Réunion, Plastic Odyssey mettra le cap sur Maurice, Madagascar, les Seychelles, avant de rejoindre la Côte d’Ivoire. Une campagne régionale ambitieuse, dont l’impact repose autant sur les solutions techniques que sur l’énergie citoyenne et éducative qu’elle suscite.
Une exposition de Plastic Odyssey est actuellement visible à Kélonia. Le navire reste accessible aux visites scolaires toute la semaine. Une opération de ramassage de déchets est organisée vendredi matin avec 150 jeunes, en partenariat avec Le Grand Port.
Mermento.fr
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