Alors que la transition énergétique s’accélère à l’échelle mondiale, Madagascar voit émerger, encore timidement, les premières voitures électriques sur son marché. Si les enjeux environnementaux et économiques plaident en faveur de ce changement, de nombreux défis restent à relever. Acteur central du secteur automobile, le Groupement des concessionnaires Automobiles de Madagascar (GCAM) organise, tous les 2 ans, le Salon de l’Auto à Madagascar. En 2024 le thème était « Mobilité et durabilité ». Un rendez-vous qui a mis en avant des solutions innovantes conciliant besoins de mobilité et environnement. Rado Ramaroson, secrétaire général du GCAM, salue cette dynamique et livre ses perspectives. Il nous éclaire sur les perspectives, les enjeux liés à l’électrification du parc automobile malgache, et la place de ce secteur dans ces processus de transformation.
Le Mémento : Les voitures électriques font leur apparition sur le marché malgache. Comment le GCAM perçoit-il cette évolution ?
Rado Ramaroson : Le GCAM considère l’électrification du parc automobile comme une transformation inévitable et structurante. Inspirée des tendances mondiales de transition énergétique, l’introduction de véhicules électriques à Madagascar, bien que timide, est un pas essentiel vers la réduction du coût des importations de carburants et la maîtrise des énergies. L’arrivée des premières ventes sur le marché reste timide, mais les signaux sont encourageants : une volonté politique affirmée, une incitation gouvernementale via la réduction de la TVA (2019) et une orientation vers l’Environnement Mondial. Et cela s’inscrit dans une logique de cohérence : la transition est amorcée et elle se place. La transformation énergétique est en marche.
Le Mémento : Quels sont aujourd’hui les principaux freins à l’adoption des véhicules électriques à Madagascar ?
R. R. : Le frein principal demeure l’infrastructure énergétique. Face à cette contrainte, plusieurs concessionnaires anticipent la situation en introduisant progressivement des véhicules hybrides rechargeables, plus adaptés à la réalité énergétique actuelle, en développant des services après-vente spécialisés (maintenance, pièces, formation…). Ils intègrent dans leurs concessions des solutions de recharge autonomes, notamment via des installations solaires pour leurs clients.
Pour les flottes professionnelles, certaines entreprises déjà dans une démarche durable sont prêtes à adopter des véhicules électriques alimentés par leur propre production d’énergie solaire. D’autres utilisent leurs surplus d’énergie renouvelable. Ces initiatives, bien que localisées, montrent qu’une électrification équilibrée et pragmatique est possible.
Le Mémento : Existe-t-il déjà des initiatives concrètes du GCAM pour favoriser l’adoption totale de l’électrique : formations, partenariats, lobbying auprès des autorités ?
R. R. : Oui, et elles se multiplient. Le GCAM joue un rôle incitatif en ce sens en mobilisant ses membres autour de concrètes actions. Nous avons intensifié nos sessions d’information et introduit l’initiation à l’électrification dans l’organisation des Salons de l’Auto, en impliquant l’État, les concessionnaires et les importateurs. Des formations spécifiques ont été dispensées aux concessionnaires afin de les préparer à l’introduction des véhicules hybrides et électriques. Le GCAM multiplie aussi les échanges et plaidoyers auprès des pouvoirs publics pour une fiscalité adaptée et des infrastructures de recharge. L’objectif est de créer un environnement favorable et d’accompagner cette transition dans une logique collective.
Le Mémento : Madagascar dans 10 ans, où voyez-vous la place du véhicule électrique dans le paysage urbain et rural du pays ?
R. R. : D’ici 2035, nous pensons que la mobilité électrique sera une réalité concrète dans les zones urbaines, soutenue par des infrastructures adaptées et abordables. L’introduction progressive de véhicules électriques y occupera une place croissante, même si les véhicules thermiques resteront majoritaires dans certaines zones rurales. Le mix énergétique évoluera, avec une diversification des sources, incluant les transports publics. On pense notamment aux bus de 10 ans équipés de bornes de recharge solaire.
Le GCAM souhaite accompagner cette mutation qui est plus qu’une tendance : une obligation technologique, économique et environnementale. La transition sera progressive, mais elle doit être collective, réaliste et ancrée dans l’intérêt national.
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