Un texte sur l'AME à Mayotte retiré à l'Assemblée après des annonces du gouvernement

En agitant le "chiffon rouge" de l'instauration de l'aide médicale d'État (AME) à Mayotte, la députée de ce département Estelle Youssouffa a obtenu jeudi des concessions du gouvernement pour l'accès aux évacuations sanitaires des habitants du département, face à l'engorgement de l'hôpital sur place. Le ministre de la Santé Yannick Neuder s'est engagé à mettre en place "d'ici la fin juillet" à Mayotte un "guichet unique", "sur le modèle de ce qui existe déjà" en Corse, pour faciliter les évacuations sanitaires de patients, par exemple vers La Réunion.

Ce guichet unique, "piloté par la Caisse de sécurité sociale de Mayotte", concernera les évacuations sanitaires "dites programmées", par exemple pour des rendez-vous de cardiologie, a précisé le ministre. Estelle Youssouffa a salué une "avancée très importante pour les assurés sociaux". Actuellement, toutes les évacuations sanitaires sont gérées par le seul hôpital de Mayotte "qui est complètement saturé", notamment du fait de la prise en charge "des étrangers en situation irrégulière", a indiqué la députée.

Elle a immédiatement annoncé qu'elle retirait sa proposition de loi visant à instaurer à Mayotte l'AME, dispositif permettant aux étrangers en situation irrégulière de bénéficier d'un accès aux soins sans avance de frais. Le texte commençait tout juste à être étudié dans l'hémicycle, dans le cadre de la journée réservée aux textes du petit groupe Liot (Libertés Indépendants, Outre-mer, Territoires). Dans le viseur de la droite et de l'extrême droite, l'AME est une des questions les plus âprement disputées au niveau national sur l'immigration.

"Mettre les différents partis face à leurs contradictions sur l'AME" a servi de "levier, pour avec ce chiffon rouge, forcer le gouvernement à donner des mesures concrètes pour les assurés sociaux", a déclaré Mme Youssouffa. Cette mesure sur les évacuations "était ce qu'on essayait de négocier depuis des semaines", a-t-elle ajouté. Selon sa proposition de loi, l'AME à Mayotte aurait permis de "solvabiliser" une patientèle irrégulière auprès de la médecine de ville, pour soulager l'hôpital, et ainsi stopper un "effet d'éviction des assurés sociaux".

- Fermetures de maternités -

Un autre texte traitant de questions de santé doit être étudié jeudi dans le cadre de la niche parlementaire Liot. Il vise à lutter contre la mortalité infantile en France. Le taux est passé de 3,5 décès pour 1 000 enfants nés vivants en 2011, à 4,1 en 2024, selon l'Insee. Une tendance "alarmante" selon le député Liot Paul-André Colombani, qui défend cette proposition de loi.

Une première mesure, consensuelle, vise à créer un "registre national des naissances", pour rassembler des éléments statistiques jusqu'ici éparpillés, et mieux comprendre les raisons des tendances actuelles. Le deuxième article instaurait, dans le texte initial, un moratoire de trois ans sur la fermeture de maternités, "sauf en cas de danger pour la sécurité des patients". Avec durant cette période un "état des lieux" réalisé sur les maternités pratiquant moins de 300 accouchements par an, particulièrement menacées de fermeture.

Mais un amendement de députés macronistes, adopté en commission, a supprimé ce moratoire, remplacé par l'obligation d'"une évaluation préalable des alternatives possibles" avant la fermeture d'une maternité. "Une maternité qui réalise peu d'accouchements peut offrir une moindre sécurité, faute d'une pratique régulière des gestes obstétriques", a souligné le député Renaissance Jean-François Rousset.

Paul-André Colombani, tout en convenant de l'existence de "causes multiples" à la hausse de la mortalité infantile outre l'éloignement de maternités, tentera de revenir via un amendement à l'écriture initiale du texte. Un moratoire permettrait aussi selon lui aux petites structures d'améliorer leur attractivité pour le personnel médical, en sécurisant temporairement leur existence. Le député dit espérer que le ministre de la Santé ne s'oppose pas à sa proposition. Le Rassemblement national devrait soutenir le moratoire, selon une source parlementaire.

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Philippe Naillet déplore un débat manqué à l’Assemblée

Le député réunionnais Philippe Naillet a réagi ce jeudi 15 mai au retrait de la proposition de loi visant à étendre l’Aide médicale d’État (AME) à Mayotte, initialement prévue au programme de la niche parlementaire du groupe LIOT. Pour lui, cette décision représente une occasion manquée d’aborder la crise sanitaire qui frappe durement le territoire mahorais.

« Il est regrettable que nous n’ayons pas eu un débat sur le système de santé à Mayotte », déclare Philippe Naillet, rappelant que c’est aujourd’hui le Centre Hospitalier de Mayotte (CHM) qui « accueille les patients étrangers en situation irrégulière et porte la charge financière en l’absence d’AME ».

Le retrait du texte fait suite à des annonces du ministre de la Santé, qui promet la mise en place d’un guichet unique pour les évacuations sanitaires programmées d’ici fin juillet. Une mesure jugée insuffisante par l’élu : « Cette mesure ne permettra pas à elle seule de résoudre la crise aiguë du système de santé à Mayotte, encore davantage accentuée par les conséquences dévastatrices du cyclone Chido. »

Philippe Naillet s’interroge également sur la portée des engagements ministériels : « Que valent les engagements d’un ministre de la Santé qui appartient à un gouvernement à la durée de vie incertaine ? » Il souligne que les évacuations sanitaires (EVASAN), dirigées principalement vers La Réunion puis vers l’Hexagone, exercent une pression croissante sur le système de santé réunionnais, déjà mis à mal par le chikungunya et le cyclone Garance survenu en février.

Enfin, il insiste sur la nécessité d’une offre de soins digne et accessible pour les Mahorais, sur leur territoire, dénonçant une stratégie d’externalisation de la santé « qui ne pourra pas être une solution de long terme ». Pour le député, la santé publique ne peut plus « être sacrifiée sur l’autel de l’austérité budgétaire ». Il assure qu’il sera « particulièrement attentif lors des prochains débats budgétaires ».


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