C'est resté comme ça depuis Chido : à Mayotte, le long chantier de la reconstruction

© Petite Terre

Des débris s'entassent dans une cour d'immeuble, les plaques de plâtre et la laine de verre barrent l'entrée d'un escalier. Six semaines après le passage du cyclone Chido, l'heure à Mayotte est parfois encore au déblaiement plutôt qu'à la reconstruction, qui s'annonce longue. Le toit de l'appartement le plus haut de cet immeuble de Petite-Terre a disparu et ses murs en bois se sont affaissés sous la puissance du vent.   

A l'étage inférieur, des morceaux de verre et de tissus jonchent le sol près d'un canapé, d'un meuble télé et d'un vaisselier intact. "C'est resté comme ça depuis Chido", le cyclone qui a dévasté le petit archipel français de l'océan Indien le 14 décembre, souffle Ali Anthum, salarié d'une entreprise de construction. "Il faut dégager tout ce qui a été abîmé avant de pouvoir faire les travaux". Un gros chantier pour la société, "débordée". Chido, cyclone le plus dévastateur à Mayotte depuis 90 ans, a causé la mort d'au moins 39 personnes et fait plus de 5.600 blessés, selon le bilan des autorités.   

Hamidat Soilihi, la propriétaire de l'appartement, absente mi-décembre, a découvert son logement trois semaines plus tard, sans pouvoir tout déblayer elle-même.   La grande majorité des maisons et bâtiments du département le plus pauvre de France ont été mis hors d'eau avec des bâches ou des tôles mais la reconstruction prendra du temps. Jusqu'au passage de la tempête Dikeledi le 12 janvier, l'urgence a été de rafistoler les toits.   

"A chaque averse, l'eau s'accumulait et faisait gondoler le faux plafond", raconte Florent, locataire à Labattoir, en Petite-Terre. Un changement de toiture n'est cependant pas à l'ordre du jour. Selon Julian Champiat, président de la Fédération mahoraise du bâtiment et des travaux publics (FMBTP), nombre d'habitants "attendent désormais un retour de leur assurance. Il faut qu'un expert passe et qu'ils soient indemnisés pour lancer des travaux". Selon la caisse centrale de réassurance, moins de 10% des logements sont assurés à Mayotte et Hamidat Soilihi fait partie de ceux qui ne le sont pas.   

"La construction du dernier appartement venait juste d'être terminée, je n'avais pas eu le temps de faire les démarches", explique cette mère de trois enfants de 5 à 12 ans, qui ignore pour l'instant comment reconstruire. La Société immobilière de Mayotte a recensé 1.500 logements impactés sur son parc de 3.200 logements, dont 1.000 sociaux, et elle aussi n'a engagé pour l'instant que les travaux les plus urgents.   

"Nous sommes en train de travailler avec les experts et les assurances et nous devrions lancer les premiers travaux dans les deux semaines à venir", souligne Ahmed Ali Mondroha, directeur de cette société d'économie mixte, qui s'attend à un coût de plusieurs "dizaines de millions d'euros".    

- Rupture de stock -    

Les entreprises de construction sont par ailleurs confrontées à un problème de taille : la disponibilité des matériaux. "Les habitants les plus aisés se sont rués sur les planches de tôle juste après le cyclone", relève Bruno Baratte, directeur d'exploitation de l'entreprise Tôle de Mayotte.   

"Ceux qui ont moins de moyens nous ont demandé des devis et ont attendu d'être indemnisés par leurs assurances. Mais très vite, nous avons été en rupture de stock sur de nombreuses références. On a passé une nouvelle commande juste après le cyclone mais on ne recevra rien avant fin mars", pronostique le professionnel. Selon Julian Champiat, les entreprises manquent "de tôle, de matériel de couverture, de charpente, de +placo+... Tout ce qui permet de construire une maison".   

Ces pénuries freinent le lancement des chantiers. Tout comme l'incertitude sur le rôle du nouvel établissement public dédié à la reconstruction, prévu par le projet de loi d'urgence voté mercredi par l'Assemblée nationale.   

"Le plus urgent a été fait dans les établissements scolaires. Des bâches ont été posées sur les toits, ce qui pouvait être sécurisé l'a été", note le président de la FMBTP, qui attend désormais de connaître les directives du nouvel établissement pour la reconstruction. "Pour les gros chantiers, des appels d'offres seront lancés, il faudra y répondre, tout ça prend du temps... Avant un ou deux mois, il se passera peu de choses sur le terrain", prévient-il.


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