Le LUX* Saint-Gilles a accueilli, ce mercredi 25 juin 2025, la Journée Patrimoniale organisée par l’Ordre des Experts-Comptables de La Réunion et Laplace, en partenariat avec la Chambre des Notaires et l’Ordre des Avocats. Une conférence destinée à “offrir une vision complète et concrète de la transmission d’entreprise”, selon les organisateurs, en abordant ses enjeux juridiques, fiscaux, civils et humains. Car transmettre ne s’improvise pas. Le Mémento était présent.
Anticiper pour ne pas subir
“Ce n'est pas parce qu’il n’a pas d’héritier ou de repreneur que la succession ne doit pas être anticipée et préparée”, a averti Jérôme Canabady Moutien, président du CROEC. “Sinon, au moment où il faudra transmettre, c’est dans l'urgence, et cela devient trés coûteux. C’est ainsi que se perdent les savoir-faire, les emplois, les histoires familiales, parce qu’il n’y a pas eu de stratégie en amont”, a-t-il poursuivi en ouverture.
Un constat partagé par Amélie Figueroa, avocate, qui a rappelé les risques d’une transmission non planifiée : “L’anticipation évite l’application stricte des règles légales de dévolution, qui ne reflètent pas toujours la volonté du défunt.” En cas de décès, les biens se retrouvent en indivision, une situation juridiquement instable où “tout héritier peut sortir à tout moment”, parfois contraint par une pression fiscale accrue. Le tout, souvent générateur de conflits familiaux.
Un cadre juridique parfois paralysant
Pour Haroun Patel, notaire, “l’indivision est une cellule pathologique”, risquant la paralysie en cas de mésentente. “Le partage judiciaire devient alors inévitable et peut déboucher sur la vente forcée du bien”. Il a insisté sur le fait que “vous ne pouvez pas librement disposer de votre patrimoine”, en raison des règles de réserve héréditaire, à moins d’anticiper via un testament, un pacte ou des outils adaptés.
Un choc fiscal et des pertes de contrôle
Selon David Fontaine, conseiller en gestion de patrimoine chez Laplace, “les décès non préparés peuvent engendrer un blocage bancaire, des pertes de marché ou encore un déséquilibre de revenus familiaux”, sans parler “des litiges sur la valorisation des parts sociales”. Il évoque également les risques d’un démembrement subi, “qui peut entraîner une gouvernance bloquée de l’entreprise”.
“Attendre, c’est souvent payer plus”
Une formule qui résume l’intervention du Kerim Moussa, expert-comptable, pour qui “le surcoût fiscal et la perte de contrôle” sont les deux risques majeurs. “Sans pacte Dutreil, on monte vite à 45 % de droits de mutation”, a-t-il prévenu, ajoutant qu’“on oublie trop souvent que les abattements se reconstituent tous les 15 ans”. Une stratégie de transmission réussie commence par un état des lieux du patrimoine : “Il faut distinguer le patrimoine privé (résidence, assurance-vie) du professionnel (parts de société, immobilier d’entreprise)”, pour choisir les bons outils : donation-partage, démembrement, assurance-vie ou pacte Dutreil.
Mais tout le monde ne partage pas forcément ce constat. Pour certains chefs d’entreprise présents dans la salle, la transmission peut aussi se faire naturellement, par étapes, sans planification “rigide”, à condition de s’entourer. Un point de vue minoritaire, mais rappelant que chaque cas patrimonial est unique.
À l’issue de la conférence, les participants ont échangé, soulignant la pertinence d’un tel événement face aux réalités concrètes des entreprises réunionnaises, souvent familiales, où “transmettre” est aussi une affaire de valeurs.
Memento.fr
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