Neuf mois après son arrivée à Matignon, François Bayrou s’apprête à quitter la rue de Varenne, sauf retournement de dernière minute. Celui qui avait imposé sa nomination en décembre 2024, au terme d’un bras de fer avec Emmanuel Macron, n’a pas su concrétiser son ambition de longue date : engager un compromis sur la dette publique, thème central de ses campagnes présidentielles.
L’ancien candidat à l’Élysée, battu à trois reprises (2002, 2007, 2012), rêvait depuis des années de devenir Premier ministre. Sa nomination, obtenue au forceps le 13 décembre, avait été justifiée par la gravité de la situation. « J’ai toujours pensé que si un jour j’avais cette responsabilité, c’est que ça irait très mal », expliquait-il en 2022, citant Clémenceau, arrivé au pouvoir en 1917. Mais face au mur de la dette, il n’aura pas pu poser la première pierre de l’œuvre qu’il promettait depuis trente ans.
En décidant de solliciter un vote de confiance avant même les débats budgétaires, il a précipité son départ. Toutes les oppositions devraient voter contre, scellant ainsi son sort.
Agrégé de lettres, élu local, député, eurodéputé et ministre à deux reprises, François Bayrou a gouverné en solitaire, entouré d’un cercle restreint de fidèles. Privé de l’influence de Marielle de Sarnez, disparue en 2021, il a géré lui-même sa communication, au prix de plusieurs maladresses. Dès sa nomination, il avait été critiqué pour avoir privilégié un déplacement à Pau, où il est resté maire, plutôt qu’une réunion d’urgence à Paris après un ouragan à Mayotte. « Pau, c’est en France », avait-il rétorqué, avant de souligner l’importance pour lui de « garder les pieds sur terre » dans sa ville d’origine.
C’est dans ce Béarn qu’il est né en 1951, fils d’agriculteurs, qu’il a construit sa carrière politique, et qu’il a été marqué par des affaires de violences sexuelles au collège-lycée de Bétharram, où il avait scolarisé ses enfants.
Privé de majorité, le Premier ministre avait obtenu l’appui des socialistes pour le budget 2025 en relançant des discussions sur la réforme des retraites, mais son « conclave » s’est soldé par un échec. Ses déclarations sur l’immigration, parlant de « submersion », ont accentué les tensions avec la gauche.
En juillet, il a présenté un plan de redressement des finances publiques qu’il voyait comme son « moment de vérité », destiné à provoquer un électrochoc. Mais son impopularité record et l’indiscipline de son gouvernement ont nourri les procès en immobilisme.
Comparé à Pierre Mendès-France, resté huit mois à Matignon, Bayrou revendique un destin similaire : bref mais marquant. « Bayrou pense qu’il a sauvé le pays mais en réalité il le plonge dans la crise », confie pourtant un conseiller.
Le président du MoDem, qui doit affronter un deuxième procès dans l’affaire des assistants parlementaires européens, assure que sa carrière politique n’est pas terminée. Il dément cependant tout plan pour une nouvelle candidature présidentielle.
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