En Guadeloupe, la guerre contre le cancer vert est déclarée

© Parc National de Guadeloupe

Certains l'appellent la peste pourpre, d'autres le cancer vert. Le miconia calvescens, plante invasive qui menace les écosystèmes insulaires, est apparu en Guadeloupe. Quatre ans après une première découverte, un nouveau foyer vient d’être détecté, relançant l’alerte. En ce début juin, dans les hauteurs de Baillif (sud-ouest de la Guadeloupe), un agent de l’Office national des forêts (ONF) progresse coutelas en main dans une forêt dense, boueuse et escarpée. Il scrute le sol et le sous-bois, à la recherche d’une plante redoutée.

"On cherche les jeunes pousses du miconia calvescens, qu’on reconnaît à ses feuilles vert foncé sur l’endroit, violacées et nervurées de blanc au revers", décrit Renaud Hirard, l’un des cinquante agents mobilisés depuis 2020 pour traquer l’espèce. Cette année-là, pendant le confinement lié à l’épidémie de Covid-19, un agent du parc national remarque pour la première fois la plante en Guadeloupe. L’inquiétude est immédiate.

"C’est une plante qui se répand à toute vitesse", explique Matthieu Fellmann, responsable biodiversité et développement durable à l’ONF : "Elle produit des millions de graines, avec un taux de germination proche de 90 %. Elle se développe sous la canopée et empêche les autres de pousser, et quand elle grandit, ses larges feuilles les empêchent de prendre la lumière". "Une feuille au sol fait repartir le miconia en drageonnant", reprend-il avant de résumer l’espèce d’une phrase : "C’est une monstro-plante".

Dès la découverte, l’opération d’éradication s’organise. Selon un document de l’ONF, "quatre à cinq agents sont mobilisés durant trois semaines pour la prospection, et quatre à six pour 27 jours d’arrachage". Plus de 4 000 plants sont alors détruits, majoritairement des jeunes de moins de 50 cm. Chaque année depuis, la zone et ses alentours sont inspectés. "En 2022, sur la zone foyer, on a arraché 1 364 pieds et en 2024, 869. Ça diminue, mais on ne peut pas relâcher la pression", martèle Matthieu Fellmann.

- Lutte à la main -

L’éradication se fait uniquement à la main, selon un protocole strict : arrachage, isolement, stockage puis brûlage. "À la fin des opérations, on rince nos chaussures à l’eau de mer pour éviter de disséminer des graines", détaille Renaud Hirard. "En 2020, l’opération a coûté 170 000 euros", indique Danny Laybourne, de la Direction de l’environnement de l’aménagement et du logement (DEAL) de Guadeloupe. Au total, environ 550 000 euros ont été investis depuis cinq ans.

La Guadeloupe est particulièrement vulnérable : selon Marc Gayot, directeur du conservatoire botanique national de l’archipel, "la flore indigène de Guadeloupe représente environ 7 % de la biodiversité nationale : il y a trois fois plus d’espèces d’arbres ici qu’en Hexagone". C’est pourquoi la découverte récente d’un second foyer à Gourbeyre, à quelques kilomètres au sud, suscite une vive inquiétude. D’autant que les budgets de lutte, en baisse ces dernières années, menacent la continuité des opérations.

Les scientifiques gardent en mémoire le précédent de Tahiti, où le miconia calvescens a envahi plus de 70 % du territoire et ruiné la biodiversité locale, malgré l’introduction d’un champignon pour freiner sa croissance. Une méthode difficilement transposable en Guadeloupe, souligne Maïtena Jean, cheffe de service au parc national. "On a quatre espèces endémiques de miconia. On va devoir repartir au combat, à main nue."


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