Le projet de loi de finances (PLF) et le budget de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2026 provoquent une levée de boucliers dans les Outre-mer, où élus et acteurs économiques ont dénoncé mardi un double "coup de rabot" de 750 millions d’euros sur les dispositifs de soutien aux entreprises.
Selon la Fédération des entreprises d’Outre-mer (Fedom), qui se base sur les estimations de Bercy et du ministère des Outre-mer, ces deux textes prévoient 350 millions d’euros de coupes sur les exonérations de charges sociales spécifiques aux Outre-mer (Lodeom) et 400 millions d’euros de moins pour les défiscalisations sur l’investissement productif. "C’est un coup de massue", a dénoncé son président Hervé Mariton, jugeant ces mesures "totalement contradictoires" avec les annonces du Premier ministre dans sa déclaration de politique générale, qui promettait une baisse des charges pour les TPE et PME.
"Les entreprises concernées par la Lodeom sont justement des TPE-PME. Le dispositif s’applique aux entreprises de moins de 11 salariés, et jusqu’à 250 pour certains secteurs prioritaires comme le tourisme, l’industrie ou l’environnement", rappelle-t-il. Créée en 2009, la Lodeom (loi pour le développement économique des Outre-mer) consiste en des exonérations de cotisations sociales destinées à soutenir le développement des territoires ultramarins. Près de 50 000 entreprises en bénéficient, principalement des PME et TPE.
Le député socialiste de Guadeloupe Christian Baptiste, qui a fait adopter un rapport d’information préconisant une réforme du mécanisme sans coupe budgétaire, a assuré que ses collègues ultramarins socialistes "se réservent la possibilité de censurer le gouvernement" si le texte n’est pas amendé. "Le coup de rabot de 350 millions d’euros est une catastrophe pour les entreprises ultramarines, ce sont des TPE à 90 %. À cela s’ajoute la suppression de la défiscalisation productive, qui représente 400 millions d’euros. C’est tout bonnement inacceptable", a-t-il déclaré.
L’ancien ministre des Outre-mer et sénateur PS Victorin Lurel a lui aussi dénoncé un budget reprenant "les pires préconisations de Bercy". "En l’état, cette copie est absolument inacceptable", a-t-il écrit dans un communiqué. "L’effort de réduction des dépenses budgétaires autant que la recherche d’une meilleure efficacité des sommes consacrées à ces +niches sociales compensées+ impliquent d’en maîtriser le coût en tenant compte des dernières évaluations", est-il indiqué dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale dévoilé mardi.
Le coût de la Lodeom a grimpé ces dernières années pour atteindre 1,5 milliard d’euros en 2024, selon une étude de l’Inspection générale des finances.
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Victorin Lurel dénonce un budget « catastrophique » pour les Outre-mer
Le sénateur de la Guadeloupe Victorin Lurel a vivement réagi à la déclaration de politique générale du Premier ministre Sébastien Lecornu, estimant que les Outre-mer sont « sacrifiés sur l’autel des compromis hexagonaux ».
S’il reconnaît certaines avancées, notamment « la suspension de l’injuste réforme des retraites » et la volonté du Gouvernement de « laisser le Parlement légiférer », le parlementaire considère que ces gestes ne suffisent pas à compenser les effets du budget présenté. « Cet apparent compromis hexagonal se fait, à cette heure, sur le dos des Outre-mer », déplore-t-il.
Selon Victorin Lurel, le projet de loi de finances constitue « un véritable cataclysme budgétaire » pour les économies ultramarines. Il estime que les mesures annoncées « imposent, a minima, 400 millions d’euros d’économies aux Outre-mer », en raison notamment d’une réduction de 11 points des taux de réduction et de crédit d’impôt applicables à l’investissement productif. À cela s’ajouteraient, selon lui, « plus de 350 millions d’euros par an de coupes budgétaires sur le régime LODEOM » prévues dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale.
Pour le sénateur, ces arbitrages reprennent « les pires préconisations de Bercy » et menacent directement l’activité économique dans les territoires. Il appelle le Gouvernement à revoir sa copie « singulièrement en faveur des Outre-mer », faute de quoi « son avalisation par les parlementaires [lui] paraît impossible ». Victorin Lurel prévient que si aucune correction significative n’est apportée, « la censure deviendra alors inévitable ».
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