Trois mois après le cyclone Chido, l'économie de Mayotte peine à se relancer

Depuis la plage de Hamjago, dans le nord de Mayotte, Halifa Massoundi regarde une bouée jaune qui flotte à la surface du lagon. C’est là que le prestataire nautique avait l’habitude de jeter l’ancre de son semi-rigide. Mais le cyclone Chido a fait sombrer son outil de travail. “Tous les bateaux qu’on voit ici se sont retournés. Il n’y en a plus que trois qui fonctionnent”, décrit-il, en désignant la vingtaine d’embarcations à moteur amarrées.

Privé de son bateau, il craint pour l’avenir de sa société, Rand O Palma, qui a cessé les sorties en mer depuis le passage le 14 décembre du cyclone, qui a fait au moins 40 morts dans cet archipel français de l’océan Indien. “J’espère qu’on pourra repartir d’ici fin avril”, explique l’auto-entrepreneur, qui a lancé une cagnotte pour financer les 10.500 euros de réparation, son assurance ne prenant pas en charge les dégâts.

À Mayotte, 101e département français, le cyclone Chido est venu abîmer un tissu économique déjà fragilisé par les pertes dues au Covid-19, à la sécheresse et aux barrages routiers érigés, début 2024, pour protester contre l’insécurité et l’immigration. Cette “accumulation des crises” freine la reprise de l’activité dans tous les secteurs, a indiqué Bibi Chanfi, conseillère départementale chargée du développement économique.

“On va dans le mur”

“De nombreuses entreprises à l’heure actuelle sont en grosse difficulté en termes de trésorerie. L’activité reprend plus lentement que ce qu’on aurait imaginé”, souligne la vice-présidente de la chambre de commerce et d’industrie (CCI) de Mayotte, Nadine Haffidou, précisant que 80% des entreprises mahoraises sont sinistrées. En cause notamment, la perte des outils de production, qui tardent à être remplacés faute de recettes. Bibi Chanfi met aussi en avant les problèmes d’approvisionnement. Le port de Longoni, sur la côte nord de la Grande-Terre, par lequel transitent le matériel de réparation et les marchandises, a été touché par le cyclone. “L’activité portuaire est complètement ralentie”, explique la conseillère départementale.

Une situation que subit le magasin de meubles dans lequel travaille Nadjida, rue du Commerce, à Mamoudzou. “En janvier, la marchandise était bloquée”, raconte la vendeuse. Au-dessus d’elle, le plafond porte encore les stigmates de l’eau qui s’est infiltrée pendant Chido. Si la plupart des devantures voisines de la rue commerçante ont repris des couleurs, plusieurs toits sont toujours éventrés, comme celui de l’agence de communication Inadcom. Ordinateurs, caméras, mobilier, studio d’enregistrement… L’entreprise a tout perdu dans la tempête, conduisant ses 17 salariés au chômage technique. Déjà en difficulté avant Chido à cause de retards de paiement de la part de clients, Zamir Saïd Ali, le cofondateur, “ne voit pas le bout”. S’il a évalué les dégâts à 120.000 euros, son assurance n’en propose que 30.000 de dédommagement. Avec cinq mois de travaux estimés pour relancer pleinement l’activité, il s’inquiète pour l’avenir de son agence : “On va dans le mur (…). On a de quoi encore tourner peut-être un mois.”

Les aides tardent à arriver

Plusieurs mesures de soutien ont été mises en place par l’État, dont une aide financière exceptionnelle équivalente à 20% du chiffre d’affaire mensuel de 2022, ou encore le chômage partiel. Mais pour l’“activité partielle, la quasi-totalité des entreprises n’a pas été remboursée jusqu’à maintenant”, affirme Nadine Haffidou. L’aide financière exceptionnelle non plus n’a pas encore été reçue entièrement. Inadcom étant inéligible à cette dernière faute d’être à jour dans le paiement de ses cotisations, Zamir Saïd Ali juge “les dispositifs pas à la hauteur” pour sauver les entreprises et le chômage partiel “insuffisant”. De son côté, Rand O Palma a “reçu seulement 1.500 euros”, note Halifa Massoundi.

Pour relancer l’économie, le département a revu en hausse l’aide à l’investissement qu’il octroie annuellement via un appel à projets. Si l’enveloppe habituelle est de 3 millions d’euros, Bibi Chanfi précise que ce sont 10 millions d’euros qui seront distribués cette année, car “il faut investir au plus vite pour reprendre le travail”.


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